"Diriger en terre inconnue"

Céline Hugot est présidente de Viollet Industries en Haute-Savoie. Elle a accepté de partager avec ENAXION son expérience de co-dirigeante d’une PME familiale qu’elle dirige avec son frère. Elle nous dévoile la façon dont ils surmontent la crise actuelle, en tirant profit de l’expérience passée de la crise de 2009, et nous explique ce en quoi le changement de cap opéré ces 10 dernières années a permis de développer une forme de résilience dans ces périodes troublées. Son regard et ses enseignements personnels nous semblent intéressants à partager à notre tour avec tous les Dirigeants en Action.

Diversifier son portefeuille clients et garder le cap sur ses avantages concurrentiels :

Céline : la crise de 2009 avait terriblement secoué notre entreprise. Nous étions alors dépendants à 85% du secteur de l’industrie automobile, avec un client largement majoritaire. La chute catastrophique du carnet de commandes nous avait conduit à mettre en place un plan social et à nous séparer de nombreux salariés. Progressivement, en 10 ans, nous avons totalement redéployé notre portefeuille clients, revu l’équilibrage de nos effectifs de salariés entre notre site de Haute-Savoie et un nouveau site en Roumanie, développé des savoir-faire métiers en particulier par le renforcement des compétences de conception sur-mesure de notre bureau d’études, renforcé notre dimension de services (délais de réponse aux besoins clients). Cette transformation sur plusieurs années a développé notre capacité de résilience. L’entreprise n’a fermé qu’une semaine durant le confinement et nos clients ont vraiment apprécié cette continuité de service. Pour répondre aux fluctuations d’activité et aux impératifs de nos délais clients, nous avons pour politique de nous appuyer sur un bon stock de matières premières. Cela nous a généré un véritable avantage concurrentiel, puisque de nouveaux clients sont venus vers nous lorsque leurs fournisseurs historiques n’étaient pas capables de répondre.

Tirer de toute difficulté une opportunité :

Céline : le rythme plus ralenti de la période de confinement nous a aidé, mon frère et moi, à prendre du recul. Nous avions depuis des années un projet d’investissement dans une nouvelle machine de découpe laser tubes et tôles, pour un investissement de l’ordre de 10% de notre chiffre d’affaires annuel. La période nous a permis de négocier un prix spécial auprès du fournisseur retenu, et nous avons pris rapidement la décision de rebondir, dans cette période incertaine, en signant cet investissement déployé en un délai très réduit. Nous sentions qu’il fallait tôt ou tard y aller… nous n’avions pas vraiment de doute, et il nous a semblé qu’il ne fallait plus attendre ! Nous avions un double enjeu : réduire nos temps de fabrication et donc nos coûts de revient, réduire encore nos délais clients pour renforcer nos avantages concurrentiels. Après 3 mois de mise en route de notre investissement, nous sommes très satisfaits, nous en mesurons déjà de nombreux fruits.

Plus que jamais, être soi, être vrai, ne pas jouer un jeu !

Céline : nous avons la chance d’être implantés dans une magnifique région et la période de confinement nous a mis plus que jamais en contact avec la nature. Personnellement, cela m’a fait réfléchir sur mon rapport à celle-ci, et sur l’importance de rester moi-même naturelle, d’être Moi sans jouer à vouloir paraître ce que je ne suis pas. Cela passe notamment par un équilibre personnel entre ma vie professionnelle, ma vie familiale et ma vie sociale. Plus que jamais, être soi, être vrai… cela m’amène en particulier à dire les choses à mes collaborateurs le plus simplement possible. Quand les choses vont dans le bon sens, il faut le dire, et dire pourquoi. Quand ce n’est pas le cas, il faut le partager également, ne pas faire semblant. Selon moi, cette vérité va de pair avec un mode managérial qui favorise la délégation. Le responsable n’est pas tout puissant, il se met au service de ses collaborateurs pour que les choses soient plus simples, plus efficaces pour eux-mêmes.

Exigeants sur les savoir-être :

Céline : Nous ambitionnons de poursuivre un rythme de croissance équilibré. Actuellement, le plus dur pour nous n’est pas de trouver des clients. Le plus difficile, c’est de trouver les talents qui seront nos collaborateurs dans la durée. Nous ne recherchons pas que des compétences techniques. Nous sommes exigeants sur les savoir-être et nous voulons des collaborateurs qui puissent se sentir bien chez nous, et construire demain avec nous. Ils doivent pouvoir partager une même culture client, tout en veillant aux performances de l’entreprise.

Viollet Industries (Groupe Champrenaut) conçoit et produit des racks métalliques spécifiques pour les besoins de manutention et de logistique des industriels. Structurée et organisée pour gérer des projets sur-mesure, l’entreprise haut-savoyarde s’appuie sur une société sœur en Roumanie. Le groupe emploie 130 personnes.